aujourd’hui aujourd’hui aujourd’hui,

le monde, encore le monde

lundi 11 avril 2022 , par Christophe Gicquel

Pierrot solaire de Bianu Zéno et L’espace entre l’éclair et le tonnerre de Claude Minière, tous deux aux Éditions Gallimard, 2022. Deux recueils de poèmes lumineux qui sortent la poésie contemporaine de l’ornière égotique et vous entraînent avec eux dans le sillage de la volupté.

J’aime la poésie lorsque son je sert le lyrisme et non un renfermement intime sur quelque condition singulière ;
qu’il porte une manière de vibration désintellectualisée, organique, déraisonnable, intuitive… l’inassouvissement de sa finitude.

« je fais nuit »
(Bianu Zéno, Pierrot solaire, Éditions Gallimard, 2022, p. 32)

« je suis un chercheur
d’altitudes internes »

(Ibid. , p. 76)

J’aime la poésie lorsqu’elle me parle d’elle, et de littérature, sans considération pour tout ce qui la ramène à une utilité existentielle, pour le poète comme pour son éditeur ou son lectorat ;
lorsqu’elle m’emporte dans son élan, jusqu’au faîte de la vague ample de son insignifiance.

« nous sommes la poésie —
le lieu où l’esprit
fusionne avec l’espace »

(Ibid. , p. 38)

J’aime la poésie lorsqu’elle se constitue en langage, c’est-à-dire qu’elle pétrit sa matière de lexique et de morphosyntaxe, en une prosodie captivante ; lorsqu’elle se réalise en une langue nouée en belles formes inattendues, loin du carcan communicatif de ses tournures épuisées ou vulgaires, ou simplifiées, ou accessibles, ou compréhensives, fédératrices, assujetties aux modes.

« tu avances pas à pas
[…]
vers ce sentiment
qui tout irise
et tout imprègne »

(Ibid. , p. 97)

« C’est blanc argent
blanc comme neige
Les dieux sont blanc de sel
Tout le reste est noir
comme la littérature »

(Claude Minière, L’espace entre l’éclair et le tonnerre, Éditions Gallimard, 2022, p. 25)

J’aime la poésie quand elle interroge davantage qu’elle ne disserte, quand elle esquisse davantage qu’elle ne caractérise, quand elle s’épuise davantage qu’elle ne supporte, quand elle me chuchote aujourd’hui aujourd’hui aujourd’hui, le monde, encore le monde.

« La laideur a quelque chose de vrai
Comme l’abandon
     Les apparences leur sont refusées »

(Ibid. , p. 58)

Voilà pourquoi je lis et relis avec délectation ces deux lumineux recueils et vous invite à en faire de même. Ils sortent la poésie contemporaine de l’ornière égotique ou de la quête du NOMbre, et vous entraînent avec eux dans le sillage de la volupté.

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